lundi 17 janvier 2011

19. Analyse d'une foulée: Dave Scott


Dave Scott est un triathlète exceptionnel qui gagna l'Ironman d'Hawaï 6 fois (bio ICI). En dépit d'une foulée à l'apparence pas très conformiste pour le moins, il fut capable de courir sur Ironman des marathons très rapides dont le meilleur en 2h41 en 1989, la course dont les images de ce post sont extraites. (Merci au site Triclair.com d'avoir mis cette vidéo en ligne: lien ICI). Vous pouvez visionner un extrait ICI sur youtube.

A l'âge "cannonique" de 42 ans, il finit cinquième à l'Ironman d'Hawai avec un marathon en 2h45, tout cela en dépit d'une posture en course à pied que beaucoup (lui y compris) qualifie d'"horrible".

Comment avec une posture pareille a-t-il pu faire jeu égal avec Mark Allen durant les 42 kms de leur duel épique en 1989 et courir des marathons aussi rapides ? Mark Allen est lui réputé pour avoir une foulée très élégante (cf: http://leplaisirdecourir.blogspot.com/2011/01/16-analyse-dune-foulee-mark-allen.html).

En fait, à y regarder de plus près, Dave Scott avait une foulée extrêmement efficace et sans doute moins traumatisante que celle d'Allen ; cette foulée de Dave Scott n'est pas sans points communs avec des coureurs comme Craig Alexander; Paula Radcliff ou Anton Krupicka (bien qu'elle contienne sans doute certains défauts qu'ont pas les autres coureurs ceux qui rend le foulée plus fluide (je pense à Alexander en particulier).

Ainsi, les caractéristiques de la foulée de Dave Scott sont principalement:
  • une cadence élevée (environ 7 à 8% plus élevée qu'Allen) ;
  • une foulée plus courte qu'Allen (environ 7 à 8% plus courte). Durant cette fameuse course de 1989, ils vont courir côte à côte durant 40 kms, Allen ne s'échappant qu'à près de 2kms de l'arrivée environ ;
  • une pose du pied plus près du centre de gravité qu'Allen:

  • très peu de déroulé du pied: son temps de contact avec le sol est bref ;
  • une levée du pied arrière vers la cuisse importante: bien que Dave Scott ait une foulée plus courte qu'Allen, il est très intéressant de remarquer que son pied arrière remonte aussi haut que celui d'Allen ; la perte d'amplitude n'a pas lieu derrière mais uniquement devant par rapport à Allen.

  • un fémur avant qui dépasse très peu l'aplomb de la rotule: c'est durant cette phase que la foulée de Dave Scott a moins d'amplitude que celle d'Allen. Allen va plus étendre sa jambe devant lui, ce que ne fait pas Dave Scott; cela a pour conséquence qu'Allen attaque plus du talon que Scott et surtout son angle d'attaque par rapport au sol est moins ouvert et le point d'impact est plus près du centre de gravité : on retrouve cette caractéristique dans la foulée d'Alexander et de Radcliff. Il semble, d'après ces images, que Scott court avec des chaussures plus plates ayant moins d'amorti qu'Allen (courant en Nike).


  • une colonne vertébrale bien droite avec une mise en tension du dos (ses épaules sont bien en arrière) : on peut remarquer que sa nuque est plus à la verticale que celle d'Allen: Allen, devant étendre son pied devant lui du fait de sa manière de courir et de l'amplitude de sa foulée, la position globale du corps en équilibre va être très légèrement plus vers l'avant que Scott, ceci pas tant au niveau du bassin (l'angle d'ouverture est très comparable) qu'au niveau de l'alignement tête - colonne vertébrale plus droite pour Scott. Scott a tendance à regarder plus loin devant lui qu'Allen d'ailleurs, l'aplomb de son menton un peu plus en retrait par rapport à son sternum

  • Bien que sa foulée ait moins d'amplitude qu'Allen, on peut noter que l'amplitude de déplacement de leurs épaules est extrêmement comparable. L'angle d'ouverture des bras également. A priori, on aurait été tenter de penser le contraire puisque leur amplitude de foulée est différente or ce n'est pas le cas, il n'y pas de corrélation évidente chez ces deux coureurs entre l'amplitude de la foulée au sol et la translation des épaules et du buste : une interprétation possible de cela est la confirmation du rôle moteur du buste dans la foulée (cf. http://leplaisirdecourir.blogspot.com/2010/12/ou-est-le-moteur.html): ainsi, Allen et Scott utilisent autant leur "moteur" l'un que l'autre.





Conclusion:

Il y a beaucoup d'enseignements à tirer de cette comparaison de styles et la foulée de Scott, en dépit de son allure "canardesque" est extrêmement intéressante :
  • l'un semble être plus économique que l'autre (Scott au contraire d'Allen) mais les deux coureurs courent exactement à la même vitesse et Allen gagne la course au final (avec un temps marathon de 2h40): l'économie de course n'est-elle pas avant tout aussi la résultante de l'entraînement ?
  • la foulée de Scott en apparence chaotique est en fait extrêmement rationnelle et efficace, et se rapproche de la foulée du 3ème type (bien qu'à titre d'exemple, la foulée de Craig Alexander soit nettement plus parfaite je trouve).
  • bien qu'Allen et Scott aient une foulée très différente en apparence, la cause de cette différence tient à un détail: le fait pour Scott de "shinter" l'amplitude avant de sa foulée; de là découle une position légèrement plus droite, une attaque plein pied plus près du centre de gravité, un temps de contact plus court au sol.





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