samedi 23 juillet 2011

23. Analyse d'une foulée : Yuki Kawauchi

Le jeune marathonien, Yuki Kawauchi, a fait sensation lors du dernier marathon de Tokyo en le bouclant en 2h08'37'' avec un finish époustouflant. Un vrai guerrier ! Ce coureur japonais est encore un coureur amateur, en dépit du kilométrage hebdomadaire impressionnant de ces entraînements. 

Sa foulée est très intéressante car elle illustre bien beaucoup des caractéristiques qu'on retrouve chez les meilleurs coureurs d'endurance. En voici un court extrait au ralenti pris au 39ème kilomètre du marathon de Tokyo.


On constate :
- une pose de pied très près de son centre de gravité avec une attaque du pied très peu sur le talon.
- la recherche d'amplitude se fait avant tout par le relevé du pied arrière vers la cuisse (cycle arrière typique de la course d'endurance).
- le pied ne dépasse quasiment pas l'aplomb du genou devant le coureur.
- le coureur lève peu les genoux compte tenu de sa vitesse.
- sa cadence de foulée est très soutenue (largement au dessus de 180).
- une très bonne utilisation du moteur vertébral (avec l'aide des bras légèrement ouverts).

Ce coureur montre très peu d'amplitude verticale. L'énergie de propulsion de son pied est redirigée vers l'avant grâce à ce mouvement de translation horizontale des épaules avec très peu d'oscillation verticale.



Sur la photo du dessus, les lignes symbolisent l'aplomb de la hanche par rapport à celui de l'épaule et montre la torsion de l'axe épaules-hanches à cet instant de sa foulée. Un joli moteur vertébral (spine engine / moteur vertébral pour les connaisseurs) !





mardi 5 juillet 2011

22. foulée et choix de chaussures

La comparaison de la foulée de Radcliffe et de Petrova permet de bien mettre en lumière les deux types de foulée propres à la course d'endurance.

1) la foulée rasante (ex: Petrova)

Les caractéristiques de cette foulée sont:
  • faible levée du pied vers la cuisse après l'appui;
  • recherche d'amplitude vers l'avant;
  • point d'impact du pied devant le centre de gravité;
  • attaque du talon.
C'est certainement la foulée la plus répandue parmi les coureurs de fond amateurs. C'est celle qui demande le moins d'adaptation par rapport à la marche. Elle reproduit d'ailleurs la gestuelle de la marche dans la séquence:
  • le pied décolle peu du sol,
  • lancement du pied vers l'avant (le pied passe devant l'aplomb du genou), 
  • premier contact du pied au sol par le talon, 
  • impact du pied devant le centre de gravité.
Face à une telle foulée, il est évident que le coureur va avoir besoin d'une chaussure qui puisse:
  • offrir un bon amorti du talon,
  • offrir un bon maintien du pied dans son ensemble: en effet, vous remarquerez que plus on attaque le sol avec le pied avancé, plus le pied prend une position extrême dans la supination et surtout dans la pronation. La chaussure doit donc pouvoir corriger ce défaut,
  • ne pas être forcément très légère: pour que la chaussure ait un bon amorti et un bon maintien, il faut qu'elle soit assez lourde de part sa structure et ses composants: mais compte tenu du fait que le coureur ne va pas chercher à lever très haut le pied vers la cuisse, le sur-poids de la chaussure n'est pas obligatoirement très pénalisant. Le poids n'est d'ailleurs pas un obstacle pour que le pied aille taper le sol devant le coureur au moment de l'impact. L'inertie qu'elle génère va même y aider.
2) la foulée arrière (ex: Radcliffe) :

Cette foulée est proche de la foulée en cycle arrière (telle que décrite par Volodalen par exemple).

Les caractéristiques de cette foulée sont:
  • levée importante du pied vers la cuisse après l'appui;
  • pas de recherche d'amplitude vers l'avant;
  • point d'impact du pied très près (voir sous) le centre de gravité;
  • attaque plein pied (voir sur l'avant du pied).
Ce type de foulée est beaucoup moins répandue parmi les coureurs de fond amateurs. Elle demande une vraie adaptation et un vrai conditionnement par rapport à la marche. Elle ne reproduit pas du tout la gestuelle de la marche dans la séquence: 
  • le pied décolle du sol à l'arrière,
  • pas de lancement du pied vers l'avant (le pied ne passe pas devant l'aplomb du genou ou très peu), 
  • premier contact du pied au sol par le milieu du pied (voire éventuellement l'avant du pied) 
  • impact du pied très près voire sous le centre de gravité.
Face à une telle foulée, il est évident que le coureur va avoir besoin d'une chaussure différente de celle du coureur à la foulée rasante ; cette chaussure devra :
  • être légère pour faciliter la levée du pied et éviter trop d'inertie vers l'avant qui emmènera le pied largement devant le centre de gravité du coureur,
  • avoir peu d'amorti du talon (car il ne sert pas),
  • offrir un maintien plus limité du pied dans son ensemble: en effet, dès lors que l'attaque du pied ne se fait par le talon mais par le milieu du pied, le pied prend moins une position extrême dans la supination et surtout dans la pronation. La chaussure n'a donc pas à forcément corriger ce défaut. L'aspect "supinateur" ou "pronateur" est moins important que pour la foulée rasante. Une chaussure du type universel ne devrait pas poser de problème aux coureurs qui ont cette foulée, même s'ils sont à la base pronateurs ou supinateurs. D'ailleurs l'usure des chaussures confirme cela: si votre foulée est plein pied, vous pourrez constater que même si vous êtes un fort pronateur (c'est mon cas!), l'usure au niveau du talon sera très réduite, voire inexistante: vous ne retrouverez pas les signes d'usure de vos chaussures aux mêmes endroits que ceux de vos chaussures utilisés pour une foulée rasante.
Evidemment, on peut percevoir facilement les dégâts que peut occasionner un mauvais choix de chaussures par rapport la foulée. Avoir une foulée rasante et s'acheter des chaussures minimalistes sera risqué, à moins que le choix d'une telle chaussure modifie la foulée pour la rendre plus proche d'une foulée arrière  Par opposition, avoir une foulée arrière et prendre des chaussures lourdes, à fort amorti et fort maintien, sera contre productif.

On peut évidemment avoir deux types de chaussures différentes: une pour les sorties longues et lentes, où on risque d'adopter une foulée relativement rasante et une pour les sorties plus rapides et dynamiques où on cherchera à adopter une foulée arrière plus bio-mécaniquement correcte.

Au bout du compte, type de foulée et choix de chaussures sont intimement liés. 

Il semble illusoire de penser que le simple fait de choisir une chaussure plutôt qu'une autre va naturellement modifier la foulée. Rien ne le démontre. Modifier sa foulée demande une prise de conscience et un travail particulier. Cela ne vient pas uniquement du choix de chaussures.







lundi 4 juillet 2011

21. Comparaison de la foulée de Radcliffe et de Petrova

Si on compare la foulée de Paula Radcliffe et de Petrova, on peut noter certains points intéressants:

- l'angle d'ouverture des genoux est très comparable : autour de 30° (Radcliffe) et 28° (Petrova), si on prend l'angle d'extension maximale de chaque genou par rapport au sommet du crâne :




- L'angle d'ouverture des genoux est quasiment identique mais le point d'appui du pied au sol est tout à fait différent: en effet, si l'on trace une droite passant de la tête et coupant l'angle à sa moitié (15° pour le cas de Paula), on s'aperçoit que Paula pose le pied sur cette droite au contact au sol alors que Petrova pose son pied largement devant cette ligne:



- L'angle d'ouverture des genoux est le même mais le point d'impact au sol est très différent : l'explication de cette différence est le trajet du pied: Paula lève vite le pied arrière du sol et le ramène assez haut vers la cuisse alors que Petrova garde une foulée plus rasante: son pied arrière ne dépasse pas la hauteur de son genou: si on cherche à visualiser le trajet du pied sous forme de "poulaine", on constate que la poulaine de Radcliffe est beaucoup plus verticale que celle de Petrova qui elle est plus proche de l'horizontale.




Conclusion:

- le coureur (tel Paula), qui cherche à poser son pied près de son centre de gravité, doit plus lever le pied arrière vers la fesse pour avoir une bonne longueur de foulée ;

- le coureur (tel Petrova), qui cherche une foulée rasante, va devoir poser son pied plus loin de son centre de gravité dès qu'il voudra augmenter la longueur de sa foulée.

En termes d'économie de course, la foulée de Petrova est peut être meilleure mais en termes anatomiques, il me semble que celle de Radcliffe est plus performante d'un point de vue bio-mécanique. Son attaque du talon est extrêmement réduite et son point de contact au sol plus près du centre de gravité.