"Au tir à l’arc, désirer atteindre la cible, c’est désirer ce qu’on a pas…
Désirer l’avenir, c’est ce qu’on appelle une espérance, donc une peur.
Comme le dit Spinoza, il n’y a pas d’espoir sans crainte, ni de crainte sans espoir…
Désirer ce que l’on a pas, c’est se séparer du bonheur.
Le
sage ne veut pas atteindre la cible mais seulement la viser bien. Il
fait ce qu’il désire et désire ce qu’il fait. Il est heureux. C’est
ainsi qu’il atteint un poux en plein cœur selon les textes taoistes. Le
sage désire ce qui dépend de lui, désire ce qu’il fait. Ce n’est plus
une espérance, c’est une volonté, c’est une action !
Ce qui compte, ce n’est pas le résultat de l’acte (le skopos), mais l’acte lui-même (le telos)"
(André COMTE-SPONVILLE, philosophe)
Cette
technique se focalise sur la maîtrise du geste. En se concentrant sur
son geste, le coureur est tel l’archer japonais, qui plutôt qu’être
obnubilé par la cible, se concentre sur ce qu’il contrôle, c’est à dire
son geste.
Si on se focalise sur les
éléments extérieurs (par exemple, les conditions de course, les
concurrents, la météo ou votre objectif chrono…), c’est souvent le
meilleur moyen de perdre ses moyens et de ne pas atteindre son potentiel
et « rater sa cible ».
Sans avoir à
forcément s’inspirer de philosophie ou de concepts japonisants, c’est un
conseil largement pratiqué par les athlètes de haut niveau que de se
concentrer sur leur technique : je me rappelle, par exemple, l’interview
d’un grand champion qui, regrettait après le championnat du monde de
triathlon longue distance, de ne pas être resté suffisamment concentré
sur sa technique durant toute la course (et il ne parlait pas que de la
natation – sport éminemment technique – mais aussi des deux autres
sports (vélo et course à pied), d’où évidemment aussi l’intérêt d’avoir
un bon bagage technique. A première vue, on aurait pu penser que son
esprit devrait plutôt rester concentré sur son objectif de temps ou de
classement et non pas à sa technique qu’en tant que champion, il devait
forcément maîtriser parfaitement après toutes ces années d’entraînement
qui l’avaient amené à un tel niveau.
Plus
prosaïquement, j’ai pu constater que les coureurs qui étaient obnubilés
par bien poser leur pied médio-pied (comme le tireur à l’arc qui ne
pense qu’à une chose, toucher le centre de la cible) avaient tendance à
passer à côté de leur foulée : leur geste n’était alors pas naturel et
certains avaient même tendance à se plaindre de douleurs du fait des
contractions musculaires qu’ils s’obligeaient à faire pour éviter à leur
pied de se poser autrement que sur l’avant.
Quand
on leur explique qu’ils devraient avant tout se concentrer sur leur
geste, le plus souvent, leur pose de pied et leur foulée se mettent en
place tout naturellement; ils se relâchent et leurs douleurs
disparaissent.
Bonne course !
Billet également publié sur www.lightfeetrunning.com